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1 nov. 2014

MEMOIRES DE CASTELBOUC - suite 24

Part. 24
 UNE LEGENDE... DES SORCIERS... SUPERSTITION ! ?
"La piété est différente de la superstition.
Soutenir la piété jusqu'à la superstition, c'est la détruire. 
Impiété de ne pas croire l'Eucharistie, sur ce qu'on ne la voit pas. 
Superstition de croire des propositions".
Blaise Pascal "Les pensées" 

FOI ET SUPERSTITION
(XVIème - XVIIIème siècles)
Le culte des saints se mêle couramment de pratiques superstitieuses ; de plus la croyance dans la toute puissance des sorciers et des sorcières, voisins et voisines doués du mauvais oeil, aimant chevaucher les balais et parcourir les clairières pendant la nuit, tient une place énorme :
Le Diable est au moins aussi présent que le Bon Dieu.
Nombreuses aussi, sont les pratiques médicales avec des formules étonnantes et d'innombrables dictons, comme "attacher un clou d'un crucifix au bras d'un épileptique et il sera guéri".
Elles n'ont cessé de courir les campagnes jusqu'au XIXème siècle, voire au XXème siècle.
Ce vieux fond de croyances héritées encadre et explique la sorcellerie : passage facile, s'il est vrai qu'il suffit de saupoudrer l'épaule de sa voisine d'un peu de cendre de crapaud pour la rendre amoureuse.
La sorcière qui revient du sabbat, le sac chargé de maléfices à faire mourir tout le village n'est jamais dotée que d'une puissance où la relation de cause à effet prend des aspects étonnants. Aussi bien la croyance aux Sorciers semble-t-elle universelle ; et la persécution qui a duré des siècles (XIVème - XVIIème) en a favorisé l'expansion. 
Peut-on conclure que la pratique religieuse est surtout une défense contre ce Démon envahissant, qui trouve dans les villages tant d'auxiliaires de bonne volonté ? (1)
MEMOIRES DE CASTELBOUC ©
Christine FIRMIN

______________________________________  
(1) Histoire de la civilisation Française (Moyen Age - XVIème siècle - Georges Duby et Robert Mandrou

10 sept. 2013

LEGENDE DE CASTELBOUC - VERSION COMPLETE -

Comme je l'ai précisé dans le précédent article, ,  la légende a fait partie de l'exposition réalisée par les Castelbounels.
Pour la petite histoire, elle a été volée assez rapidement ! (tout - et tout le monde - n'est malheureusement pas parfait)
 Aussi, avant de continuer la publication des photos, voici  le texte de la version complète : il mérite qu'on s'y arrête un moment car c'est une vraie tranche de vie qui est contée là !.
Bonne ballade dans le passé.


LA LEGENDE



" Alors tous s'en allaient : rois, évêques, barons
Gueux des communes, serfs de la glèbe, larrons
Malandrins, tous, la Croix Blanche entre les épaules Pêle-mêle...
C’était sur le pays des Gaules un flot humain qui passe,
Impétueux, grondant, immense, remplissant les vallons,
Inondant les plaines, submergeant les monts noirs de son ombre.

Ces foules précédaient d’autres foules sans nombre
Dont les bruits effaceraient les aigles dans les aires.
Derrière elles, châteaux et bourg restaient déserts
Monastères, cités devenaient solitudes.
Les hommes, ébahis devant ces multitudes
Tout à coup soulevés par le souffle de Dieu,
Les suivaient et partaient, sans un regard d’adieu
Pour le champ, la maison, les vieux, la femme enceinte.

« Dieu le veult » et chacun courait en Terre Sainte.
Car c’était en l’an mil nonante six, je crois,
D’Aiguillette à Capluc, tout seigneur prit la croix
Dolan et Montesquieu, Monbrun et Charbonnières
Entraînaient leurs vassaux rangés sous les bannières
Et dans la gorge étroite où le Tarn rampe au pied
Des monts, il ne resta qu’un homme estropié
Un soir d’automne, on vit ces bandes dévaler
S’enfoncer dans la brume épaisse des vallées,
Vers le Rouergue, et tout devint silencieux.

SEUL du haut de sa tour qu'un grand roc dresse aux cieux
Surplombant au-dessus d'une bourgade agreste
Quand la troupe passa Raymond cria "JE RESTE,
Je reste pour garder vos femmes, vos enfants.
Allez et puissiez vous revenir triomphant
Moi le haubert m'étouffe et le casque m’assomme...
Adieu » Puis il se mit au lit et fit un somme.
C’était un banneret de mœurs douces, ayant
L’esprit simple et trouvant le repos fort seyant.
Hors de son campement il n’eut point fait deux lieues.
Il ne voulait rien voir sinon les nappes bleues
De sa rivière, où l’ombre est si fraîche en été ;
Les coteaux où la vigne étale sa gaité,
Et les rochers altiers dentelant sa falaise.
Il ne désirait rien, sinon de boire à l’aise,
Devant l’âtre en hiver ; sous la treille au printemps,
Et son gobelet d’étain, depuis vingt ans,
Il se regardait vivre avec béatitude
Être assis lui semblait la meilleure attitude :
Il resta donc assis et but comme devant.
Oh, dans les sombres nuits d’hiver,
Lorsque le vent secouait les meneaux de la fenêtre,
Comme il apprécia mieux encor son bien être
Et savoura, dans la rigueur de la saison,
La paix et la douceur tiède de la maison.
Mais l’avril arriva, suave, un avril rose :
Les coteaux bruns, les près jaunis, le val morose
S’égayèrent : le ciel bleuit, le soleil rit
Et l’aubépine au creux des ravines fleurit.
Et le sire, parmi ces ivresses de vie,
Lui en sentit éclore une autre âme ravie
Et généreuse, un jour ou le matin vermeil
Aveuglait ses yeux lourds encore de sommeil.
Où des souffles erraient plus doux qu’une caresse.

Alors il se dresse, secouant sa paresse,
Comme un ressuscité rejette son linceul,
Une honte le prit d'être inutile, seul
En son castel ainsi qu'un ours en sa tanière
Et le cœur débordant de sève printanière
Il descendit au bourg tapi sous le rocher.

Or les femmes voyant leur seigneur approcher
L'entourèrent disant "Ah ! Que tristes nous sommes
Filles sans nos galants, épouses sans nos hommes
Venez-vous apporter remède à nos ennuis »
« Vous plait-il de nous prendre en pitié, gentil sire »
Que mornes sont les jours, que longue sont les nuits !"

Le cœur du banneret mollit comme une cire...
Sans doute qu’un regard aussi l’ensorcela
Ce qui suit ne se peut expliquer sans cela
« Oui, dit-il, de vos maux je connais le remède
Je vous consolerai toutes si le ciel m'aide,
Venez me confier vos peines » Une vint
Bientôt il ne resta plus dame ou damoiselle
Dans le bourg qui n’eut mis à l’épreuve son zèle

Aucune n’entendit cet homme dire : « Non »
En moins d’une semaine il acquit un renom
Tel que l’on accourut de tout le voisinage
Et le Castel passa lieu de pèlerinage
Où notre banneret tint la place du saint.

Toutes volaient à lui, comme un ardent essaim
Vole pour la piller à la grappe vermeille,
Il était cette fleur dont la femme est l’abeille,
Et jamais d’une fleur les pistils satinés
Ne furent par autant d’abeilles butinés.

Contre un essaim c’est peu qu’une corolle seule.
Ainsi put en juger Raymond qui, las et veule,
Pour avoir compati trop aux maux de ses gens,
Moins dispos désormais, les trouvait exigeants :
Volontiers à plus d’une il eût demandé grâce ;
Il n’osait point : c’était déshonorer sa race,
Mentir au bon renom de dix preux, ses anciens.
« Un contre tous » était la devise des siens
Et, fidèle, il resta lui seul contre elles toutes.
Une vieille lui dit : "Cela finira mal
A l'user de la sorte on crève l'animal ! "
« Messire, à sa vigueur mesurait les épreuves.
Je vois comme un troupeau de fauves, trop de veuves
À vos trousses : il n’est de si beaux appétits
Que ceux de veuves à qui les morceaux sont partis.
Croyez m’en ; votre hôtesse est pleine de malice,
La lèvre est fort gourmande et ne lâche un calice
Qu’après l’avoir vidé. Craignez pareil destin »

« O Vieille, fit Raymond, à peine le festin
Commence et tu voudrais que je lève la table ?
Le mets qu’un jeûne a fait trouver plus délectable
Des convives à peine a réjoui la faim,
Et tu voudrais qu’alors je dise : « c’est la fin »
Bonne femme, tu n’en parles que par envie
Va, la table est pourvue et restera servie,
Toi, demeure à l’écart et jeûne s’il te plait »

Ainsi qu’il l’annonçait, le régal fut complet.
Mais la meilleure chose est de peu de durée
Et ce régal trop court ne fut qu'une curée
Où la femme croqua jusqu'au dernier lambeau.
Pauvre Raymond ! Un soir hélas, comme un flambeau
Qui jette en expirant une plus vive flamme,
Dans un effort suprême et doux, il rendit l'âme.

Un trépas si soudain excluant tout remords,
Nul ne lui récita la prière des morts
Son cadavre fut mis en terre sans le prêtre
Et la vieille conta qu’elle avait vu paraître
La nuit suivante, sur le roc où le manoir
S’élève, un étrange animal, velu, noir,
Un grand bouc qui poussant des bêlements infâmes,
Dardait vers la bourgade où reposait les femmes
L’éclat de son regard fixe et concupiscent
Tandis que d’autres voix, vagissant, glapissant,
Ou le rut fait vibrer de rage ou sa tendresse,
Répondaient à l’appel que le bouc leur adresse
Du fond de la vallée à la cime du mont.

Et la vieille ajouta : "C'est l'âme de Raymond"
Vous l’avez reconnu avant que je la nomme,
Car votre maléfice a transformé cet homme
En bête, et vous l’avez bien vite dépêché
Chargé de votre honte et de votre pêché,
Encor tout frémissant de vos fureurs charnelles
Comme un bouc émissaire, aux flammes éternelles.

Ô CASTEL, tu seras CASTELBOUC désormais »

Depuis lors on entend, la nuit, sur ces sommets
Où le donjon crevé porte au front des ramures,
Un bêlement suivi par d'étranges murmures.
Et les veuves, songeant aux veuves de jadis,
Se signent et tout bas disent : "De profundis".

( « Aux Gorges du Tarn » Louis Jourdan - Paris Lemerre 1894 – Archives cote n° 999) 



13 sept. 2012

CASTELBOUC LA LEGENDE


Le Père Louvreleul cite au début du 18 me siècle dans ses " Mémoires historiques sur le pays de Gévaudan " Castelbouc parmi les sept merveilles du Gévaudan, grâce à une vaste grotte  au milieu d'une chaîne d'autres rochers, dont on fit un four si grand et si vaste "qu'avant qu'on en ait fait le tour, le pain qu'on y met est déjà cuit".

Une autre version de l'histoire, bien plus amusante est celle du poète Louis Jourdan qui a embelli cette légende dans son petit recueil "Aux Gorges du Tarn" (Paris, Lemerre, 1894).

Pour un poète, la légende était facile à construire,
Castelbouc : château du bouc.


" Alors tous s'en allaient : rois, évêques, barons
Gueux des communes, serfs de la glêbe, larrons
Malandrins, tous, la Croix Blanche entre les épaules Pêle-mêle...

Seul du haut de sa tour qu'un grand roc dresse anxieux
Surplombant au-dessus d'une bourgade agreste
Quand la troupe passa Raymond *cria "je reste"...
Moi le haubert m'étouffe et le casque m 'assomme...

Une honte le prit d'être inutile, seul
En son castel ainsi qu'un ours en sa tanière
Et le cœur débordant de sève printanière
Il descendit au bourg tapi sous le rocher
Or les femmes voyant leur seigneur approcher
L'entourèrent disant "Ah ! que tristes nous sommes
Filles sans nos galants, épouses sans nos hommes
Que mornes sont les jours, que longue sont les nuits !"

Le cœur du banneret mollit comme une cire...
Oui dit-il de vos maux je connais le remède
Je vous consolerai toutes si le ciel m'aide...
Et le Castel passa lieu de pèlerinage......

Une vieille lui dit : "Cela finira mal
A l'user de la sorte on crève l'animal I .."

- O Vieille, fit Raymond, à peine le festin
Commence et tu voudrais que je lève la table?...

Mais la meilleure chose est de peu de durée
Et ce régal trop court ne fut qu'une curée
Où la femme croqua jusqu'au dernier lambeau...
Pauvre Raymond ! Un soir hélas, comme un flambeau
Qui jette en expirant une plus vive flamme,
Dans un effort suprême et doux, il rendit l'âme.

Son cadavre fut mis en terre sans le prêtre.
Et la vieille conta qu'elle avait vu paraître
La nuit suivante, sur le roc où le manoir
S'élève, un animal étrange, velu, noir
Un grand bouc qui poussait des bêlements infâmes
Dardait vers la bourgade où reposaient les femmes
L'éclat de son regard fixe et concupiscent...
Et la vieille ajouta : "C'est l'âme de Raymond"...

Depuis lors on entend, la nuit, sur ces sommets   
Où le donjon crevé porte au front des ramures,
Un bêlement suivi par d'étranges murmures.
Et les veuves, songeant aux veuves de jadis,
Se signent et tout bas disent : "De profundis".