9 févr. 2016

MEMOIRES DE CASTELBOUC - suite 25 ©

Part. 25
 TEMOIGNAGES 
ci-dessus : soeur d'Anna et son mari



Madame Anna Bouty (née en 1904) raconte comment, enfant, elle a entendu ses parents et ses voisins, habitants de CASTELBOUC, parler de la Sorcellerie et quelles formes prenait celle-ci avant la première guerre mondiale.
La discussion que j'ai eue avec cette dame est rapportée ici sous sa forme brute, ceci afin de garder tout le "naturel" de notre conversation. Pour plus de cohérence dans le récit, j'ai dû conserver des détails qui paraissent ne pas avoir de rapport très précis avec le sujet ; mais ils n'en demeurent pas moins intéressants pour cette étude.
QUESTION - Pouvez-vous me parler de la sorcellerie ? Je crois que vous vous souvenez de certains faits s'étant déroulés durant votre enfance.
REPONSE - La sorcellerie, ce n'était pas beau ! Je me souviens surtout d'une histoire concernant une certaine Agathe, ou plus exactement sa fille Germaine.
Q - Cela se passait en quelle année ?
R - Je ne me souviens pas très bien. Mais c'était avant la guerre de 14-18 ; je crois que j'avais une dizaine d'années lorsque ma mère me le racontait. Cela devait s'être passé vers les années 1890...
Voici l'histoire de Germaine : Germaine était une enfant unique. Ses parents possédaient une petite propriété à Chaldas. Mais la famille habitait Castelbouc.
Or dans le village vivait un certain M.... Ce personnage avait passé une partie de sa vie dans le Midi de la France. Il était revenu au village et depuis son retour, Germaine le suivait partout, sans arrêt ! Elle n'acceptait de manger qu'en sa présence. Quelquefois, elle s'est même sauvée la nuit. 
Ses parents étaient très inquiets. 
Les gens de Castelbouc et des environs prétendaient avec force que Germaine était ensorcelée par cet être que personne n'estimait On aurait dit que cette pauvre fille était folle ! 
Q - Ne s'agissait-t-il pas simplement d'une amitié née entre les deux jeunes gens ? 
R - Non ! Les gens étaient persuadés que la fille était ensorcelée par cet homme. D'ailleurs il n'était pas bien vu dans le pays
Q - Et par la suite, que s'est-il passé ?
R - Ses parents ont emmené Germaine à la Vierge de Mende pour la faire "désensorceler". L'Evêque était là ainsi que mon père (1) qui était adjoint.
Pour le village c'était une affaire très grave ; cela avait amené un grand remue-ménage à CASTELBOUC !!!.
Ensuite, elle n'a jamais été comme avant. Elle ne s'occupait plus. On aurait dit qu'elle ne vivait plus. Par la suite, ses parents l'ont mariée à une personne de BLAJOUX.
Après la disparition de l'ensorceleur, elle a été malade et a dû s'aliter ; cela jusqu'à sa mort, un an plus tard. 

Entre temps, elle avait beaucoup grossi. Elle est morte très jeune.
Q - Cet "ensorceleur" avait-il cette seule "victime" ? 
R - Oui, c'est la seule personne sur laquelle ses "pouvoirs" avaient réussi. Ma mère disait qu'il avait essayé ur d'autres mais que cela n'avait pas "marché". 
Quoi qu'il en soit, celle-ci en est morte ; ses parents étaient désespérés. (Après sa mort, ils fabriquèrent de l'huile de noix, au moulin à huile qui se trouvait au pied du rocher du château. Il ne faut pas confondre avec le moulin à blé qui, lui, était situé à l'entrée, près de la source).
moulin à blé
Q - Etait-ce le seul sorcier ?
R - Oui, mais il y avait d'autres faits surnaturels.
Q - Lesquels ?
R - Je me souviens d'une dame, et même de plusieurs, qui racontaient qu'elles voyaient de grandes lumières qui montaient d'un ravin et qui illuminaient tout le bois. 
Personne ne savait d'où cela provenait.  
Il y avait aussi un autre phénomène : on voyait de nombreuses lumières qui sortaient d'un aven et qui tournaient autour.
Les gens du village prétendaient que c'étaient des âmes qui venaient demander des messes.. Cela les effrayait. Or beaucoup de gens jetaient des animaux morts dans cet aven ; pour ma part, je crois que tout provenait de gaz se dégageant des charognes sous l' effet de la chaleur et qui provoquaient des étincelles ... Mais ceci est "mon" explication et je ne sais pas si c'est la bonne. D'ailleurs, je n'ai jamais dit que je n'y croyais pas car on m'aurait prises pour une folle, surtout si j'avais essayé d'expliquer le phénomène !!!
Q - Le curé du village, qu'en pensait-il ? En parliez-vous avec lui ? 
R - Le curé n'en parlait pas De toutes façons, nous ne parlions pas beaucoup avec le curé. Nous allions simplement à la messe, nous payions le culte et donnions des messes : c'était là les seules occasions de parler au Curé, en fait peu souvent. Nous en parlions entre nous au cours des nombreuses veillées que nous faisions. (2)


MEMOIRES DE CASTELBOUC ©
Christine FIRMIN

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(1) mon arrière grand père (note du rédacteur)
(2) propos recueillis début années 70

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